A donde te quieren mucho no vengas a menudo (Ne va pas trop souvent là où les gens t’apprécient)
Voilà une deuxième liste, de coups de coeur littéraires cette fois-ci. Le classement est toujours aléatoire et l’ordre n’a toujours pas d’importance. Je me confesse d’emblée, j’aimerais lire plus, mais pour 1001 raisons, mon rendement a souffert depuis quelques années. En concoctant ce petit palmarès, je constate des « carences » évidentes. Je suis passé à côté des romans français du XVIIIe et XIXe siècle, tout comme les grands auteurs russes. J’ai des livres de Proust, Duras et Zola qui s’empoussièrent lamentablement et Joyce ne me dit strictement rien alors qu’il est toujours de bon ton d’en apercevoir la jaquette dans une librairie personnelle non ?… 😉
On parle ici de choix et la valeur littéraire que les experts prêtent à tel ou tel ouvrage n’est pas un critère ici. La sélection est dictée par le plaisir, les émotions et les réflexions suscités par ceux-ci. Une autre donnée intéressante : le contexte dans lequel s’est faite la découverte d’un livre ajoute une forme de plus-value à son attrait. En lien avec une personne signifiante, lors d’un voyage mémorable ou encore, lors de périodes plus difficiles, tous ces éléments se recoupent. Rassurez-vous, je ne serai pas plus loquace sur le sujet, mais sachez que ces facteurs sont, pour certaines oeuvres, parmi les raisons fondamentales qui expliquent leur présence ici.
À vous aussi de prendre le temps de concocter votre propre palmarès. C’est un exercice, somme toute, fort intéressant qui nous ramène à plein de choses oubliées et nous plonge dans un certain processus d’introspection. Ne stresser pas sur le temps, le moment de le faire n’a pas d’importance, mais ce serait bien de les partager éventuellement, un jour. On peut rêver…
Coups de coeur littéraires :
St John Mandel, Emily Mandel : Station 10 (2016)

Perrin, Valérie : Changer l’eau des fleurs (2018)

- Lemaitre, Pierre : Au revoir la-haut (2014)
- Auréolé du prix Goncourt, cette oeuvre surprenante se lit comme un polar qu’on dévore pour en connaître le dénouement dès que possible. Faut le faire avec un sujet comme l’après-guerre (de 14-18) et la façon dont la France traitait ses poilus et surtout les centaines de milliers de cadavres des »héros » qui jonchaient le nord du pays. Inspirée d’un scandale réel, l’histoire empreinte de cynisme et d’humour noir se veut un portrait décapant d’une époque révolue.
- John Kennedy Toole : La Conjuration des imbéciles (1980) Cela vaut vraiment la peine d’aller lire la biographie de cet auteur sur Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/John_Kennedy_Toole Vous comprendrez bien des choses. Il s’agit du seul roman que j’ai lu deux fois dans ma vie. L’histoire est simple : un type obèse, profiteur, menteur et d’une paresse stupéfiante, tente par tous les moyens possibles de tirer profit des gens et des situations qui l’entourent. D’une culture encyclopédique, le personnage évolue dans une Nouvelle-Orléans décrépite au début des années 60. Il est, je peux l’affirmer, mon roman préféré, ne serait-ce que pour son impertinence et son humour complètement débridé. J’ai rarement autant ri en lisant un livre. En plus, c’est la seule oeuvre à avoir remporté le prix Pulitzer…à titre posthume !… Un conseil : il est nettement préférable de le lire dans sa version originale anglaise, car la traduction est agaçante.
- Jonathan Litttell : Les Bienveillantes (2006) Une lecture assommante, technique, fastidieuse et indigeste. Pourtant, j’ai adoré, mais il faut vraiment survivre (le mot n’est pas trop fort) aux 200 premières pages d’un livre qui en compte près de 700. L’illustration la plus efficace des rouages de la folie nazi à travers le destin d’un SS qui, grâce à son opportunisme et sa chance insolente, survit aux carnages de la IIe Guerre mondiale. Le dernier chapitre est d’une perfection terrifiante. Une lecture que je considère comme très exigeante. À noter qu’il s’agit d’un auteur d’origine américaine qui a écrit cette brique directement en français.
- Maurice Druon : Les Rois Maudits (1955-1977) Le must des sagas historiques rédigé avec génie. Il y a des chapitres, des phrases et des intriques mémorables. Cela se lit d’une traite et marque pour la vie. Templiers, guerres, trahisons, châteaux etc… In-con-tour-na-ble.
- Émile Ajar : La vie devant soi (1975) Tellement beau, tellement simple.
- Louis-Ferdinand Céline : Voyage au bout de la nuit (1932) La plume trempée dans le vitriol, Céline décape allègrement la société française de l’entre-deux guerre. Tout y passe et dans une langue absolument unique où les points de suspension pullulent. Une bombe littéraire monumentale par un homme à l’âme obscure, torturée et pleine de rancoeur. On est loin de Walt Disney ici. Mais quel bouquin !
- George Martin : Le trône de fer (1996- ?) Je sais, le choix est un peu prématuré. Mais, quand on parle de coup de coeur, en voici un vrai ! Oeuvre de fiction-historique qui se déroule dans une forme de XIVe siècle, sur un continent inventé de toute pièce et dans un royaume qui l’est tout autant. L’érudition historique jumelée à une série d’intrigues passionnantes et voilà une recette parfaite pour se coucher trop tard car incapable de laisser le livre. Haletant.
- Stephen King : Shining (1977) L’auteur est bien connu et je suis loin d’avoir lu tous ses romans. Une chose est certaine cependant, préadolescent, je n’oublierai jamais la lecture de Shining, seul au vieux chalet de mes parents, lors d’une soirée de tempête estivale. J’étais terrorisé autant par la lecture que les bruits du lieu. Sans parler de la chambre 213…
- José Saramago : L’Aveuglement (1995) Si tout le monde devient littéralement aveugle en même temps, comme on attrape un rhume, que se passera t-il ? Confinés dans un espace clos, des individus tentent péniblement d’apprivoiser leur nouvel état. Et quand la « contagion » se répand et qu’ils sont abandonnés, comment survivre ? Des alliances se forment et l’horreur s’installe. Un roman étrange et terriblement efficace. Sueurs froides assurées.
- Boris Pasternak : Le docteur Jivago (1958) L’un des rares grand roman russe. La fresque parfaite et tragique du docteur Jivago (pas Omar Sharif !) à travers les bouleversements de la Révolution de 1917. Un très, très grand livre doublé d’une des plus belles histoires d’amour de la littérature. Jugez par cet extrait à propos de sa maîtresse perdue dans la tourmente de la Guerre :
« Ma charmante, mon inoubliable ! Tant que le creux de mes bras se souviendra de toi, tant que tu seras encore sur mon épaule et sur mes lèvres, je serai avec toi. Je mettrai toutes mes larmes dans quelque chose qui soit digne de toi, et qui reste. J’inscrirai ton souvenir dans des images tendres, tristes à vous fendre le cœur. Je resterai ici jusqu’à ce que ce soit fait. Et ensuite je partirai moi aussi. »
- Cormac McCarthy : La route (2006) Un homme et son jeune fils errent sur une route sans nom après l’apocalypse qui a ravagé la Terre et tuée 99% des humains. L’ultime survie dans un monde hostile et sans pitié, mais aussi l’expression de l’amour inconditionnel d’un père pour son enfant. Une écriture crue et sans détour. Angoissant de réalisme. Un livre qui se grave au chalumeau (aïe) dans votre esprit et qu’on ne peut jamais oublier.
- J.R.R. Tolkien ; Le Seigneur des anneaux (1955) Cette trilogie dense et magique était, selon moi, seule dans sa catégorie jusqu’à l’arrivée de Game of Throne. Mais cela demeure une lecture passionnante.
- Primo Levy : Si c’est un homme (1947) Comment expliquer à son enfant (disons plutôt adolescent…) la Shoa et les camps de la mort ? Simple. Faites-lui lire ce petit roman magnifiquement écrit. En peu de mots, toute l’horreur du génocide est illustrée avec une terrible efficacité. Troublant et nécessaire. Dans la même catégorie, je suggère aussi La nuit d’Élie Wiesel qui est tout aussi bouleversant.
- Michel Tremblay : Les chroniques du Plateau Mont-Royal (1978-1997) Pourquoi Michel Tremblay ? Parce qu’il parle de mon quartier de naissance, des écoles de mon enfance et du Plateau à une époque où on ne se vantait pas nécessairement d’y habiter. Avant la flambée délirante des prix et de l’embourgeoisement risible du secteur. À travers l’imaginaire de Tremblay, je revois distinctement mes grands parents, tantes, oncles et pas juste les manteaux de poil qui s’empilent sur le lit lors des fêtes de famille en hiver.
- Michel Houellebecq : Les particules élémentaires (1988) Rarement un écrivain aura polarisé autant les gens. Décadent, vulgaire et inutile pour plusieurs, brillant, décapant et superbe pour d’autres. Vous aurez compris que je me retrouve dans le second groupe. La lecture de ce roman m’avait jeté en bas de ma chaise ! C’est rédigé dans un style unique par un auteur vraiment spécial. L’archétype du français chiant qui envoie promener tout le monde avec grâce et arrogance. Vous ai-je donné le goût de le lire ?
- Rainer Maria Rilke : Lettres à un jeune poète (1932) À travers une série de lettres, une personne en conseille une autre sur la vie, l’amour et ses vicissitudes. Initiatique. Merci Élaine pour m’avoir fait connaître Rilke, il y a si longtemps.
- John Irving : Une prière pour Owen (1989) Une histoire parfaite par un écrivain chevronné. C’est à se demander pourquoi l’adaptation cinématographique n’est toujours pas faite. C’est meilleur, et de loin, que Le monde selon Garp pour lequel Irving s’est fait connaître mondialement. Tout culmine parfaitement dans les derniers chapitres comme un vrai feu d’artifice.
- Michel Tournier : Le Roi des Aulnes (1970)
- Pour moi, on parle ici de littérature avec un « L » majuscule. Tournier fait depuis longtemps partie de mes écrivains préférés et Le Roi des Aulnes représente le sommet de son art. L’histoire d’un pauvre type capturé dans la débâcle française de mai-juin 40. Prisonnier de guerre en Prusse orientale, il se transforme peu à peu, littéralement, en ogre qui s’empare d’enfants pour nourrir un IIIe Reich en déroute… L’Apocalypse décrite avec une stupéfiante érudition. Un chef-d’oeuvre.
- Herman Hesse : Narcisse et Goldmund (1930) En plein Moyen-Âge, le destin de deux amis au tempéraments et valeurs complémentaires. Un livre d’une profonde sensibilité et empreint d’espoir. Magnifique.
- Robertson Davies : La trilogie de Deptford (1970-1975) Un monument de la littérature canadienne-anglaise, mais souvent snobé ou méconnu au Québec. À tort. La trilogie de Deptford se classe facilement dans les meilleurs livres écrits au pays. L’histoire serait longue à résumer, mais croyez moi sur parole, elle est d’une richesse sans pareil et commence tout simplement par une boule de neige lancée au visage d’une femme, tout le reste en découle…Je rêve du jour où je pourrai lire les autres romans de ce très grand auteur. Merci à Sylvie qui me l’a fait découvrir.
- William Styron : Le choix de Sophie (1979) Plusieurs ont vu le remarquable film du même nom, mais si vous n’avez pas lu le roman, alors précipitez-vous. C’est prodigieusement bien écrit et une fois que vous êtes bien accroché, vous ne pourrez pas l’abandonner. Rarement une histoire aura réussi à traduire avec autant de brio les émotions vécues par des personnages inoubliables. À travers le narrateur Stingo, combien de fois me suis-je retrouvé souvent, adolescent maladroit, pour qui la femme était une terra incognita… État de grâce.
- Michel Folco : Dieu et nous seuls pouvons (1991) Une fascinante histoire de bourreaux qui amorce une trilogie par laquelle Folco se rendra célèbre. C’est hyper vivant, drôle et palpitant. L’un des meilleurs romans à caractère historique. À lire, absolument, si ce n’est déjà fait !
- Gabriel Garcia Marquez : L’Amour au temps du choléra (1985) L’exubérance de l’auteur et une histoire d’amour inoubliable. Un roman qui demeure en tête pour toujours. Et puis, avec un peu de chance, nous irons voir sa maison en Colombie dans quelques jours !
- J. D. Salinger : L’Attrape-coeur (1951) C’est devenu une lecture obligatoire dans les écoles anglophones, un peu comme les figures imposées dans certains sports. Cela enlève un peu de son lustre à cette oeuvre majeure qui fait trop souvent l’objet d’un « devoir » pour beaucoup de lycéens. Car il s’agit d’un ouvrage tellement d’actualité qui illustre parfaitement les aléas de l’âge ingrat. Je l’ai lu vers 13 ou 14 ans et certains passages me troublent encore par leur réalisme et l’acuité des émotions décrites…
- Victor Hugo : Quare-vingt-treize (1874) Le point d’orgue romanesque de Victor Hugo. La description lyrique et vivante qu’il fait de la Guerre civile en Vendée et de la Terreur qui sévissait en France dans les pires heures de le Révolution est tout simplement renversante. C’est la plume d’un très grand écrivain.
- Umberto Eco : Le nom de la Rose (1980) Un peu comme Le Choix de Sophie, si vous croyiez que le visionnement du film suffisait, détrompez-vous. Le livre fourmille de détails intéressants et mérite d’être lu. Umberto Eco est un intellectuel de haut niveau en Italie. Ses romans ne sont pas toujours les plus faciles d’accès, mais celui-ci vaut le détour. Pour avoir une bonne idée de la vie monacale vers 1327…
- Gilles Courtemanche : Un dimanche à la piscine à Kigali (2000) Une histoire banale. Un homme blanc aime une femme noire au beau milieu du carnage entre Tusis et Hutus au Rwanda en 1994. Percutant et tragique. Un fleuron de notre littérature. Rien de moins.
- J. K. Rowling : La série des Harry Potter (1997-2007)
- Que dire de plus sur cette série qui est désormais un classique de la littérature jeunesse sinon que j’ai beau chercher, je n’ai jamais rencontré une seule personne qui n’a pas aimé celle-ci. Un véritable tour de magie !
Alors, des commentaires ? Réactions ?
Ah…le plaisir de lire… C’est le voyage du pauvre… J’ai apprécié plusieurs ouvrages que tu cites mais je pense que j’aime encore plus leurs auteurs : Houellebecq, Folco (une citation superbe : « Les enfants sont comme les pets, y’a que les siens qu’on peut sentir. »), Tournier (tout!) sont mes favoris. Je remarque. Très peu de bons policiers dans cette liste. Pourtant en vacances, quels compagnons! R.J. Ellory est à découvrir si ce n’est déjà fait. Hasta luego. Brenda
Hola Brenda,
Como va ?
Merci pour ton courriel. Je constate que nous avons des atomes littéraires chrochus !
Pour les polar, pas vraiment. J’ai lu quelques polar dont un Ellroy que j’ai aimé, mais aucun qui m’ont marqué au point de retrouver dans un Top26 !
J’ai retrouvé ce blog avec plaisir! Je remarque peu d’autrices dans ce palmarès! Des ajouts depuis 2013?
Amitiés!
-K